Xavier Niel a consacré la journée de ce vendredi 18 septembre aux Bordelais. Invité par Virginie Calmels, le patron de Free s’est exprimé sur sa vision de l’entreprenariat devant un public de 1 600 personnes au Palais des congrès de Bordeaux, avant de découvrir l’écosystème numérique local, notamment à travers la visite du Node et de Darwin.

Si Xavier Niel a accepté l’invitation de Virginie Calmels, adjointe du maire Alain Juppé à l’économie, l’emploi et la croissance durable, il a souhaité que la conférence se déroule sous un format interactif. Ainsi, quatre entrepreneurs bordelais, sont montés sur la scène du Palais des congrès pour l’interroger :

L’ensemble du public présent lors de cette conférence, entrepreneurs, professionnels du numérique, étudiants, ou simples curieux, était impatient d’en savoir plus sur ce patron français qui a bien réussi (10ème fortune de France) et de connaître ses clés du succès.

Le mot d’ordre de Xavier Niel : la disruption

Si Virginie Calmels définit Xavier Niel comme un homme visionnaire, lui considère qu’il est nécessaire d’avoir une bonne vision du produit que l’on crée, mais surtout une bonne vision de son marché. Pour être disruptif, il faut connaître son marché sur le bout des doigts. Ainsi, vous serez capable de révolutionner votre secteur, par exemple, en allant chercher un autre type de clientèle, ou en mettant plus de technologie dans vos produits.

Il faut donc trouver des éléments de différenciation : booster la qualité, casser le prix, créer un nouveau produit. D’après Xavier Niel, ce qui fera le succès d’un produit ou d’un service, c’est sa désirabilité, qui repose sur sur deux critères : sa qualité et son prix, puis sa viralité. « Google n’a jamais fait de publicité, mais tout le monde l’utilise« .

Toutefois, renouveler son marché ne se fait pas toujours sans heurts, l’exemple d’Uber illustre bien que cela s’accompagne souvent de mécontentement et de protestation. Le changement a toujours fait peur.

Par ailleurs, l’enjeu pour une entreprise qui se développe va être de conserver « l’esprit start-up« . Il n’est pas nécessaire d’être vingt autour d’une table de réunion pour inventer un nouveau produit ou un nouveau concept. Les petites équipes sont plus efficaces. Il faut simplifier les étapes de création au maximum. De plus, le mélange de personnes ayant des profils très différents peut être souvent explosif, dans le bon sens du terme !

« Le succès entraîne le succès » Xavier Niel

Enfin, il faut avoir des succès visibles, pour donner envie, attirer des investisseurs, des nouveaux talents.

L’école 42, une pédagogie disruptive

Pour trouver de nouveaux talents, Xavier Niel a justement créé l’école 42. Là encore il s’agit d’une approche disruptive de la pédagogie. Le but est d’apprendre en faisant. Peu importe le profil des étudiants qui souhaitent intégrer l’école, on ne leur demande rien sur leurs diplômes passés, leur parcours. La sélection se fait à partir de jeux de logique, puis sur la motivation.

Xavier Niel est parti du constat que les ingénieurs français sont présents partout dans le monde et sont parmi les meilleurs. Cependant actuellement le secteur numérique connaît une pénurie de développeurs qualifiés. Cette école est donc différente, ouverte 24h/24, 7j/7, les étudiants viennent du monde entier. Presque la moitié n’ont pas le bac, mais peu importe, cela ne les empêche pas d’apprendre.

Quelques bémols malgré tout : la culture générale n’est pas assez présente, l’apprentissage de l’anglais n’est pas optimal et seulement 10% de filles font partie des effectifs. Il y a donc encore beaucoup de travail pour convaincre les jeunes femmes à s’orienter vers des carrières scientifiques et numériques. Je vous renvoie vers l’article Le digital, une chance pour les femmes.

Bordeaux n’a rien à envier à la Silicon Valley

Mais si Xavier Niel a choisi d’investir son argent dans l’école 42, c’est aussi pour exprimer sa reconnaissance envers la France, qui lui a permis de réussir alors qu’il n’est parti de rien.

Pour le patron de Free, la France est un pays formidable pour entreprendre. Les aides sont nombreuses, la fiscalité n’est pas parfaite, certes, mais lorsqu’on se lance elle est particulièrement avantageuse. Avant, pour créer son entreprise, il fallait avoir des fonds, aujourd’hui on peut entreprendre depuis chez soi. Pour lui, la question des embauches est plus liée à une nécessité de simplification (du code du travail, notamment) qu’une problématique de coût. Et, à un entrepreneur qui l’interroge sur l’éventualité de quitter Bordeaux pour développer son entreprise, Xavier Niel, lui rétorque : « Pourquoi voulez-vous quitter Bordeaux ? Vous avez tout pour réussir ici ! ».

D’après lui, l’image de la Silicon Valley ne correspond pas à la réalité : la fiscalité n’est pas plus avantageuse, le coût du travail est trois fois plus élevé. Bref, l’herbe n’est pas forcément plus verte ailleurs qu’en France.

A l’heure où le « French Bashing » est à la mode, Xavier Niel nous a donné une autre image de la France et de ses entrepreneurs. C’est plutôt agréable et motivant d’entendre un grand patron défendre son pays et croire en sa jeunesse.

Et, n’oubliez pas « entrepreneur » est un mot français utilisé dans le monde entier !

 

Julie ALBENQUE